De l'excès de la souffrance à l'excès de la méchanceté : La vengeance
écrit le: 28 janvier 2015 par admin
Une expérience n’est pas une nature : c’est librement que l’homme fait le mal. Mais la liberté qui se détermine pour le mal est une liberté intérieurement affectée par son objet : elle est le fait d’un homme dont toutes les actions sont des passions et dont la capacité même de commettre le mal suppose sa capacité de le subir. Comment peut-il en aller autrement, si la liberté humaine est une liberté incarnée ? Les preuves objectives qu’une telle liberté donne d’elle-même reconduisent toutes à l’épreuve subjective où la volonté se confond avec le corps et où celui-ci s’apparaît indivisément comme un « je peux » et comme un « je souffre ». Non seulement le pouvoir de faire mal est le pouvoir de faire souffrir, mais il suppose encore lui-même le pouvoir de souffrir.
La méchanceté ne pourrait, sans le lien qui l’unit originairement à la souffrance, demeurer ouverte au repentir ; elle ne donnerait jamais lieu à la souffrance rétrospective du remords et de la pitié. H11e priverait aussi de sens la souffrance liée au châtiment. Une phénoménologie de la souffrance supprimera donc ensemble le mystère qui restait, chez Kant, celui d’un choix que rien ne motive, et l’énigme où demeurait prise, chez Schelling, la motivation première du mal dans la nature et plus spécialement dans la nature humaine.