Le pragmatisme : vérité et action
Le pragmatisme (du grec pragma, l’action) est un courant philosophique américain apparu à la fin du XIXe siècle dont Peirce est le fondateur. La critique européenne du pragmatisme le caricature souvent à travers des formules apparemment ridicules (« est vrai ce qui marche », « est vrai ce qui a du succès ») confondant deux sens du mot : le pragmatisme des affaires (effectivement développé dans un pays où la tradition commerciale est forte) et la pensée américaine. Le pragmatisme comme doctrine doit donc être clairement distingué du pragmatisme au sens courant du terme, qui désigne l’attitude de celui qui attache plus d’importance à la pratique qu’à la théorie.
Il faut également se déprendre du risque d’une seconde confusion. Le pragmatisme (substantif) est une doctrine philosophique plus large que la dimension pragmatique (adjectif) du langage. L’aspect pragmatique du langage (à distinguer des aspects syntaxique et sémantique : voir chapitre 2) concerne l’usage en acte de la langue. On peut s’étonner que le langage, ensemble de signes abstraits, soit ainsi rapproché de l’activité pratique de la parole, de la communication concrète. Pourtant, à partir de l’analyse des signes, Peirce va être à même de proposer une conception inédite et originale de la vérité qui concentre tout l’intérêt des débats autour de ce courant philosophique.
Peirce : la signification pratique des signes
Qui est Charles Sanders Peirce (1839-1914) ? Philosophe et logicien, Peirce marqua toute la philosophie américaine du XXe siècle dans les nombreux domaines qu’il étudia. N’ayant pas la possibilité de faire une carrière universitaire, ses ouvrages et articles furent publiés à titre posthume. Il laissa à sa mort environ cent mille pages de manuscrits et aucune œuvre systématique. Une faible partie seulement de la sélection d’écrits édités (Collected Papers, 8 vol., 1931-1958) est traduite en français. Il apporta des contributions majeures en logique contemporaine. Sa réflexion sur la nature des signes fonde la sémiotique (ou science des signes) qui est la source de la linguistique moderne, avec l’œuvre de Ferdinand de Saussure (1857-1913). Il est l’auteur d’une phénoménologie et le fondateur du pragmatisme. Peirce et William James étaient les principaux animateurs du Metaphysical Club où s’élaborèrent les thèses du pragmatisme.
La maxime du pragmatisme
Peirce est attentif à la complexité de la nature du signe, qui ne se laisse pas enfermer dans un seul aspect, et plus particulièrement à sa dimension pratique. Le pragmatisme est la théorie de la détermination de la signification des signes : comment arrêter l’acception d’un mot ? De fait, la signification d’un mot ne se réduit pas à la notion présente dans l’esprit de quelqu’un (la recherche de Peirce n’est pas psychologique) mais elle doit inclure les effets pratiques.
Une méthode plutôt qu’une doctrine
Cette méthode permet d’abord de fournir un critère de démarcation entre les énoncés abstraits ayant un sens et ceux qui en sont dépourvus. L’énoncé abstrait (les mots ou énoncés qui décrivent des choses et des êtres matériels ne sont donc pas concernés ici) doit pouvoir être la source de conséquences expérimentales et observables. La métaphysique est plus particulièrement visée puisque ses “énoncés” sont une « suite de mots disposés conformément à la grammaire, simulant une proposition sans en être une ».
Peirce vise par ce moyen à résoudre les problèmes philosophiques fondamentaux qui reçoivent des solutions diverses, voire contradictoires, ce dont témoigne l’histoire de la métaphysique. Le pragmatisme est donc une méthode de clarification des idées plutôt qu’une doctrine. Elle doit permettre de se débarrasser des idées générales de la métaphysique et des cibstractions de l’idéalisme. Selon la formule de James, la fonction de la philosophie devrait être de découvrir « quelle différence résulterait-il pratiquement pour un homme » (Le Pragmatisme) s’il adoptait telle ou telle conception.
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