L'entreprise de justification théologique de la guerre
L’entreprise de justification théologique de la guerre menée par saint Augustin servira plus tard à légitimer le pire. Dans La Cité de Dieu, saint Augustin va jusqu’à écrire que tout soldat Hcrvant dans une guerre même injuste est innocent puisqu’il ne l’ait qu’obéir au prince et que chez les vrais adorateurs de Dieu, les guerres mêmes sont pacifiques car elles ne sont pas faites par cupidité ou par cruauté mais dans un souci de paix pour réprimer les méchants et secourir les bons. Thomas d’Aquin citera ce passage dans sa Somme théologique.
C’est sous l’influence déterminante de saint Augustin que les auteurs du Moyen Age n’ont pas développé une théorie de la paix mais, qu’à l’inverse, ils n’ont jamais condamné la guerre par principe, se contentant d’en fixer les limitations dans sa pratique (jus in bello). Un pénitentiel anglo-saxon du VIIe siècle déclare que si le roi mène une armée contre des insurgés ou des rebelles et fait la guerre pour le royaume ou la justice ecclésiastique, quiconque commet un homicide dans ces circonstances n’aura pas commis une faute grave ; seulement, à cause de l’effusion de sang, il ne devra pas fréquenter l’église pendant 40 jours et sera astreint à pratiquer le jeûne pendant plusieurs semaines.
De toutes les entreprises de justification chrétienne de la guerre, celle de Thomas d’Aquin jouira du prestige le plus considérable. Il est à remarquer d’abord que le Docteur Angélique traite de la guerre non pas, comme de nombreux théologiens le feront ultérieurement, dans la partie de sa Somme théologique consacrée à la justice mais dans celle qui traite de la charité. En effet, la juste intention (ou intention droite) qui légitime la guerre consiste avant tout dans la volonté de venir en aide à son prochain lorsque celui-ci est opprimé ou maltraité. C’est donc par charité, par amour du prochain, que la guerre peut alors être justifiée. Dans la pensée de Thomas d’Aquin, seul l’amour du prochain peut justifier, à certaines conditions, le recours à la guerre.